Archimandrite Grigorios Papathomas, La réception nomocononique du monachisme (IIe‑VIIe
siècles) (Comment le monachisme fut confirmé par les canons de l’Église et les
lois de l’Empire), Éditions Epektasis, Kétérini (Grèce), 2004, 496 p.
Ce livre
est la publication d’une thèse post-doctorale d’Habilitation à diriger les
recherches présentée à la Faculté de droit Jean Monnet de l’Université de
Paris-XI en 1998 par le Père Grigorios Papathomas, professeur de droit canon à
l’Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge de Paris et doyen du Séminaire de théologie orthodoxe Saint-Platon de Tallinn (Esthonie).
Il étudie la réception nomocanonique
du monachisme (c’est-à-dire la façon dont le monachisme s’est institutionnalisé
au sein de l’Église et de l’Empire romain, à travers les canons de celle-là et
les loi [nomoi] de celui-ci) pendant
la période déterminante qui s’étend du IIe au
VIIe siècle.
Il se fonde exclusivement sur les
sources canoniques ecclésiales et les sources législatives civiles (dites en un
seul mot « sources nomocanoniques ») ; autrement dit, il traite
du monachisme en tant qu’institution et tel qu’il est vu par le
« législateur canonique ecclésiastique » et par le législateur civil
impérial, sans aucunement se préoccuper de sa dimension spirituelle.
Une première partie de l’ouvrage
regroupe les canons ecclésiaux et les lois impériales concernant le monachisme
en un Corpus des canons et des lois.
Une telle synthèse rend un grand service, d’une part parce qu’elle réunit des
textes épars et pas toujours facilement accessibles, d’autre part parce qu’une
partie des textes législatifs produits ici n’avaient pas encore fait l’objet
d’une traduction en langue française. Les sources canoniques s’étendent du
concile d’Ancyre (314) jusqu’au concile in
Trullo (691), tandis que les sources législatives vont des Constitutions
impériales de Théodose Ier (390) à la Novelle 137 de Justinien (565).
Dans la deuxième partie du volume,
l’auteur, après avoir procédé à des observations préliminaires (§ 1), pose
quelques questions conditionnant l’examen du contenu des canons et des lois : Y
a‑t‑il plusieurs formes de vie monastique ? (§ 2) Qui sont les moines ? Sont‑ils
des clercs ou des laïcs ? (§ 3).
La suite aborde différents thèmes qui sont
épars dans les textes et que l’auteur dégagés pour en présenter une vue
synthétique : l’entrée dans le monachisme, la tonsure, la sortie du
monastère (§ 4), l’élection de l’higoumène (§ 5), l’anticipation de
l’institution monastique de l’avaton
(interdiction faite aux femmes d’entrer
dans un monastère d’hommes et réciproquement) (§6), la soumission canonique des
moines à l’évêque local, la responsabilité canonique et les droits de l’évêque
sur les moines et sur les monastères (§ 7). L’auteur traite enfin du monachisme
face à l’esclavage (§ 8) et au mariage (§ 9), ainsi que des biens des
monastères et de la capacité civile des moines (§ 10), sans pour autant
négliger le rapport antinomique entre l’“institutionnel” et le “charismatique”,
question omniprésente au cours des siècles suivants et toujours épineuse (§
11).
Dans sa préface, le professeur Jean
Gaudemet, qui a dirigé la thèse, note : « Le P. Papathomas sait
retrouver derrière la sécheresse des normes les pulsions de la vie. Il montre
combien le Droit plonge dans la société. Il tente de savoir qui a prescrit la
règle et qui a souscrit le texte proposé. Il saisit la norme qui exprime le
droit. Mais il n’ignore pas la partie qui s’engage pour diriger l’homme vers ce
qu’elle estime bon. Canons ecclésiaux et lois civiles disent ce qu’il faut
faire et ce qui est interdit. Ils montrent la voie à suivre, invitent à s’y
engager et, s’ils le peuvent, contraignent les réticents. Parce qu’il retrouve
l’homme à travers la loi et la société qu’il faut ordonner, ce livre, loin
d’ignorer le Droit dont il cite les termes, en laisse percevoir les ambitions,
les mérites, les faiblesses. »
Jean-Claude Larchet